Quand visiter les producteurs aide à bien manger

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Du 16 au 18 novembre, le 1er Grand rendez-vous en agrotourisme et tourisme gourmand aura lieu à Victoriaville. Il s’agit d’un événement mobilisateur ayant pour but de faire du Québec une destination savoureuse, dynamique et remarquée non seulement sur le plan international, mais aussi aux yeux des Québécois. Parce qu’on a tant de saveurs et de producteurs à découvrir sur notre propre territoire! Quel est le lien avec la nutrition? Vous voulez dire quels sont LES liens, car il y en a plein à tracer entre l’agrotourisme [1] et la saine alimentation. En voici cinq qui vous donneront des fourmis dans les jambes pour aller visiter nos producteurs!

Manger sainement est au cœur des valeurs des Québécois. C’est ce que révèle le récent sondage Léger Marketing mené dans le cadre du Sommet Alimentation 2017, dont notre collègue Amélie parlait ici. Le volet Demandes et attentes des consommateurs québécois, dévoilé le 21 octobre dernier, indique que « se nourrir sainement pour maintenir ou améliorer ma santé » a été identifié parmi les trois valeurs les plus importantes en matière d’alimentation par près de trois répondants sur quatre (73%). Viennent ensuite le prix des aliments et la commodité.

Si vous nourrir sainement est important pour vous à l’instar des trois quarts des répondants (ou si vous avez pour mission de valoriser l’importance de la saine alimentation pour la promotion et le maintien de la santé [2]), il est pertinent de connaître les façons par lesquelles l’agrotourisme peut nous outiller à bien manger.

1. Pour mettre le focus sur les aliments plutôt que sur les nutriments

« Les aliments représentent beaucoup plus que la somme ou la soustraction de leurs nutriments. L’alimentation, ce n’est pas des mathématiques! » lance notre collègue Stéphanie Côté, comme un cri du cœur, dans son récent billet sur le Guide alimentaire. Dans le même esprit, Le nutritionniste urbain Bernard Lavallée écrivait dans La Presse : « On doit manger des aliments, pas des nutriments. Et les aliments ne se trouvent pas sous forme de poudres, de pilules ou de liquides concentrés. Ils ont été vivants. Ils ont poussé dans des champs ou ont été élevés dans des fermes« . Chers amis, en vous lisant, je vous ai applaudi jusqu’à la tendinite. J’ajoute qu’il faut également s’intéresser à ces champs et à ces fermes où œuvrent des passionnés qui produisent des aliments de qualité. L’agrotourisme a le potentiel de créer de l’intérêt envers les producteurs et leur réalité, de mieux connaître les aliments qu’ils produisent et de les contextualiser (en y associant des visages, des histoires et des paysages) plutôt que de les décortiquer. En mettant le focus sur les aliments et ce qui les entoure, l’agrotourisme aide à éviter la fausse piste du nutritionnisme dans notre désir de bien manger.

2. Pour consommer des aliments moins transformés

Parlant de bien manger et de notre collègue Bernard, il a publié, en 2014, un article dans lequel il demandait à douze nutritionnistes leurs trucs pour y parvenir. Le premier de la liste : consommer des aliments le moins transformé possible. Quand on visite des producteurs pour découvrir leur travail et en apprendre plus sur leurs produits, on peut aussi faire des courses à la ferme. Ce qu’on rapporte? Des fruits et des légumes frais de saison, de la viande fraîche ou congelée, des fromages artisanaux, des oeufs, des farines moulues sur pierre, des produits cuisinés « comme à la maison » sans longue liste d’ingrédients imprononçables ou tactiques de marketing nutritionnel qu’on gagne à ignorer, rappelle d’ailleurs Hélène Laurendeau dans l’article de Bernard.

3. Pour inspirer à cuisiner au fil des saisons

Hélène Laurendeau expliquait aussi à Philippe Mollé du Devoir, cet été, que « jamais [elle] ne s’attarde aux calories consommées ; elle ajuste plutôt son alimentation en fonction des saisons et de la disponibilité des produits« . Avoir accès à tous les aliments en tout temps est pratiquement perçu comme un « droit », si bien qu’on en oublie les saisons qui rythmaient notre alimentation il n’y a pas si longtemps, quand ce qu’on mangeait ne parcourait pas encore des milliers de kilomètres avant d’atteindre notre assiette. En visitant les producteurs, non seulement on se reconnecte aux saisons, mais on revient à la maison avec des aliments frais, locaux, peu ou pas du tout transformés ET avec les conseils de ceux qui les ont produits pour les cuisiner simplement à la maison. Cuisiner à partir d’ingrédients de base est d’ailleurs une des choses les plus efficaces pour mettre en œuvre les points #2 et 4.

Et puisque « acheter au meilleur coût possible » est la seconde valeur la plus importante pour les répondants du sondage mentionné en début de texte, soulignons que les produits locaux sont offerts à meilleur prix durant leur saison d’abondance et qu’ils sont d’autant plus économiques lorsqu’achetés sans intermédiaire auprès d’un producteur, au marché ou à la ferme.

4. Pour associer du plaisir aux aliments

Déguster et manger avec plaisir, c’est sain! « Lorsqu’on s’intéresse davantage à l’origine des aliments, lorsqu’on prend le temps de les choisir, de les cuisiner et de les manger, on les apprécie beaucoup plus et on mange automatiquement mieux » affirme Stéphanie Côté. Bingo! S’intéresser à l’origine des aliments dans un contexte plaisant est d’ailleurs une excellente raison de mettre l’agrotourisme au menu! Les repas revêtent ensuite une couche de plaisir supplémentaire quand ils nous rappellent les rencontres enrichissantes et les belles expériences vécues chez les producteurs. De plus, visiter les agriculteurs et les artisans gourmands qui cultivent et développement des aliments uniques, identitaires, reflets d’un territoire et d’un savoir-faire local, c’est aussi une façon de les supporter et de participer à une sorte de résistance à la standardisation du goût.

5. Pour favoriser le développement du goût des enfants

Les activités à la ferme sont autant d’expositions positives aux aliments, qui favorisent le développement du goût des enfants! L’agrotourisme, en famille, avec le camp d’été ou en groupes scolaires, c’est non seulement amusant mais ça permet aussi d’accompagner les enfants sur le chemin de la découverte et de la diversité alimentaire.

Je m’arrête ici, sans aborder l’impact positif de l’agrotourisme sur la sensibilisation au gaspillage alimentaire, ou comment il aide à devenir des mangeurs-citoyens plus écoresponsables. Le sondage du Sommet de l’alimentation 2017 révèle que « choisir des aliments qui respectent la nature et l’environnement » a été nommé parmi les trois valeurs les plus importantes par seulement 15% des répondants, « choisir des aliments qui respectent le bien-être des animaux » par seulement 7% et « acheter c’est voter » par un maigre 3% des répondants. Ça ne veut pas dire que ces enjeux ne sont pas importants à nos yeux; ça révèle toutefois que pour une majorité, NOTRE santé (et celle de notre portefeuille) passent avant. C’est pourquoi je zoome ici sur les liens entre les visites chez les producteurs et la saine alimentation. Je sais toutefois que le reste va suivre. Car ce qu’il y a de fabuleux avec l’agrotourisme, c’est qu’en plus de s’outiller à bien manger dans un contexte plaisant, on devient tranquillement, par la bande, des mangeurs plus curieux, sensibles et responsables.

Notes

[1] Selon la plus récente définition du Groupe de concertation sur l’agrotourisme au Québec (2002): «L’agrotourisme est une activité touristique complémentaire à l’agriculture ayant lieu sur une exploitation agricole. Il met en relation des producteurs/trices agricoles avec des touristes ou des excursionnistes, permettant à ces derniers de découvrir le milieu agricole, l’agriculture et sa production à travers l’accueil et l’information que leur propose leur hôte.»

[2] Extrait inspiré de la mission de l’Ordre professionnel des Diététistes du Québec.

[3] Clin d’œil à mes amis d’Extenso, qui n’ont pas encore fini de rire de la rapidité à laquelle je risque de développer une tendinite quand je fais un geste répétitif avec enthousiasme… comme presser 30 têtes d’ail lors d’une cuisine collective racontée ici.

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